De la tâche difficile de
rassembler les femmes:
les conférences des femmes


Par Greta Hofmann Nemiroff

Au cours des dernières années, nous avons assisté à la multiplication des conférences de femmes au Canada. En réunissant des femmes provenant de différents milieux et ayant des intérêts variés, ces conférences ont servi à briser l'isolement vécu par la plupart des femmes dans notre société. Récemment, des groupes nationaux ont pris des initiatives qui ont provoqué des changements législatifs et ont même réussi à organiser un débat électoral sur la condition féminine auquel ont participé les chefs des principaux partis politiques, ce qui est un précédent. Aucune de ces luttes n'aurait pu être gagnée s'il n'existait un important réseau de femmes prêt à passer rapidement à l'action. Cette mobilisation se fonde sur le "networking" qui se fait aux conférences, qu'elles soient locales, provinciales ou nationales.

Je pense que le nombre significatif de conférences de femmes (certaines étant devenues des événements annuels) qui ont lieu au Canada depuis le début des années soixante-dix a été une force sociale importante. Néanmoins, il me semble que les femmes pourraient faire un meilleur usage de ces occasions de se rencontrer. Il est difficile et coûteux de réunir les femmes dans ce pays et nous avons beaucoup à faire: préserver nos acquis si difficilement obtenus et revendiquer ce qui devrait être nôtre depuis toujours: l'égalité totale dans tous les domaines.

Les conférences des femmes
sont-elles différentes de celles
des hommes?

Souvent les conférences de femmes tentent de réconcilier sans trop de succès le style typiquement masculin généralement utilisé (Robert's Rules of Order) et un ton de confiance et de collaboration. Comme ces tendances reflètent des façons d'être contradictoires, ce qui en résulte varie: adoption de solutions provisoires ou mauvaise volonté lorsque le "féminisme sentimental" cède le pas à l'application inflexible des règles. Souvent les conférences importantes regroupent des membres provenant d'organismes qui ont adopté des modus operandi très différents, des collectifs ou des groupes ayant des structures hiérarchiques.

Bien que nous comptions dans ces cas sur la collaboration de toutes, il n'en demeure pas moins que nous n'avons pas une méthode propre aux femmes pour gérer la prise de décisions. Conséquemment nous finissons toujours par adopter les modèles des hommes sans toutefois avoir leur conviction de l'efficacité de ces modèles. Mme Jill Vickers, professeure à l'université de Carleton nous promet depuis longtemps le code Roberts (Roberta's Rules of Order), plus approprié au mode d'action des femmes. Espérons que ce livre tant attendu sera terminé bientôt.

Y a-t-il d'autres points sur lesquels les conférences de femmes diffèrent? Avez-vous déjà vu un service de garderie offert à une conférence des chefs de police, par exemple, ou même à une convention politique?

Les femmes et les hommes vont à des conférences pour rencontrer d'autres personnes préoccupées des mêmes problèmes et dont les compétences différentes peuvent servir d'encouragement, et pour renforcer leurs liens d'appartenance. Mais si l'échange d'information est souvent semblable dans les conférences qui rassemblent des femmes et dans celles qui rassemblent des hommes, la façon dont les femmes créent des liens est différente. Les grandes beuveries ou les "cherche la femme" sont plutôt rares dans les conférences de femmes comme le sont aussi les poignées de mains et les mots de passe échangés mystiquement.

Les femmes vont dîner ensemble, discutent longuement en prenant un verre ou se réunissent amicalement dans la chambre de l'une des participantes si la conférence dure plus d'une journée. De toute évidence les conférences devraient être planifiées en tenant compte de ces réalités. Je pense entre autres aux mornes cocktails qui affligent depuis longtemps les conférences nationales comme celles du CAC (Comité d'action canadien) ou de l'ICRAF (l'Institut canadien de recherche sur l'avancement des femmes). Parce qu'ils s'inspirent des modèles masculins, ils sont toujours empesés et ennuyeux; nous devons définitivement trouver mieux. Il semble que les femmes soient plus douées pour les rapports interpersonnels que pour les rassemblements plus anonymes.



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