Une guide à l'horizon Par Dominique Morval Cet article est réimprimé avec la permission du Bulletin AEF, Automne 1985. Une rencontre de l'ampleur du Forum de Nairobi représente un événement assez extraordinaire auquel, quand on y participe, il est difficile de rester indifférente. Ainsi, un bon nombre de femmes, bénéficiant d'un horizon plus large, auront tendance, de retour dans leur pays, à modifier leur vision des choses. En effet, ce genre de rencontres oblige celles qui y participent à faire preuve d'une grande ouverture d'esprit, si elles veulent échanger. Décalage profond Les intérêts, les priorités, les problèmes peuvent diverger d'une région du globe à une autre. Ainsi, il existe un décalage profond entre les préoccupations des femmes des pays développés et celles des femmes du Tiers-monde: les unes revendiquent l'égalité salariale, les autres sont confrontées au problème de la faim. Venues de milieux si différents, il est difficile d'en arriver à un consensus surtout quand des considérations politiques entrent en jeu. En effet, dans de nombreux ateliers, les discussions ont pris une allure très politique: situation d'urgence des femmes du Sahraoui, apartheid, dialogue de paix au Moyen-Orient, femmes du Tiers-monde en exil. Et se creuse davantage le fossé entre les priorités des femmes des pays occidentaux et des participantes des autres systèmes socio-politiques! Une réflexion d'une Africaine du Sud illustre très bien ma pensée: "Parler d'égalité entre hommes et femmes apparaît, pour nous, une question secondaire par rapport à tous les problèmes que nous connaissons dans notre pays présentement. Avant d'exister en tant que femmes, nous aimerions bien que notre statut d'être humain soit reconnu." Ce à quoi les femmes des pays occidentaux rétorquent qu'il y a d'autres sessions de l'ONU organisées spécifiquement sur le sujet. De plus, elles ajoutent qu'il faudrait éviter de s'éloigner du but du Forum, censé mettre l'accent sur l'éducation, le contrôle des naissances... Mais traiter de sa condition de femme en ignorant le contexte politique et économique dans lequel on vit semble chose assez difficile. Pacifistes. Ah oui? Les débats dans les ateliers ont souvent suscité des tensions au sein des participantes; certaines ont même eu recours à la force pour clore la discussion. Aussi, après avoir assisté à ces querelles où l'obtention d'un consensus semblait littéralement impossible, j'ai du mal à partager l'opinion de certaines qui soutiennent que si les femmes détenaient le pouvoir, l'on vivrait dans un monde plus pacifiste. Où sont les jeunes??? En tant que jeune déléguée au Forum 1985 j'aurais un mot à dire. La place que nous occupions était relativement restreinte. Certains pays ne se sont même pas donné la peine d'envoyer des jeunes femmes au sein de leur délégation. Ainsi, sur plus de 800 ateliers, on en dénombrait seulement cinq qui traitaient spécifiquement des jeunes. Cela semble assez disproportionné, surtout si l'on considère que 1985 est l'Année internationale de la jeunesse! Situation d'autant plus ironique qu'on sentait le désir des participantes d'élaborer des stratégies pour l'amélioration de la condition de la femme d'ici l'an 2000. L'intégration des jeunes dans ces débats apparaissait donc indiquée puisque ce sont probablement elles qui appliqueront dans quelques décennies les décisions prises à Nairobi. Expérience unique En conclusion, je peux dire, sans aucune retenue que le Forum 1985 s'est avéré un apprentissage, une expérience assez unique. Renouveler ce genre de rencontre serait tout à fait souhaitable afin que d'autres puissent à leur tour en profiter, question d'élargir les horizons. |
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