ÉDITORIAL

S'instruire les unes les autres

par Norma Lundberg


"Nous traversons toutes des torrents sur nos propres pierres de gué".
Susan Grey Dueck

Ce numéro de Women's Education des femmes parait a un moment où le pays traverse une grave crise économique, et où les femmes portent le poids du stress qui accompagne celle-ci. Les coupures budgétaires en éducation, dans les programmes de formation et d'alphabétisation, en milieu de travail et dans les garderies nous touchent toutes profondément. Les articles de ce numéro ne portent par explicitement sur ces restriction et n'abordent pas un seul sujet. Ils traitent des luttes que mènent les femmes pour s'instruire, dans tous est implicitement pressent le lien qui existe entre notre apprentissage et nos moyens d' existence, mais aussi notre conviction que l'existence ne peut être compartimentée.

S'il y a un fil commun à tous les articles de ce numéro, c'est bien celui des différences (de race, de classe sociale, d'aptitudes physiques) aux quelles les femmes font face dans le cadre de leur apprentissage. Ce qui ressort de ce conflit est un respect à l'égard de ces différences, l'admission que nombre de choses doivent changer et que dans les diverses catégories de femmes, de minorités visibles ou de femmes handicapées (ou toute catégorie traditionnellement exclue), il y a des femmes qui ne demandent qu'à se raconter.

Sandra Acker parle des femmes travaillant dans renseignement supérieur, secteur où les universitaires du sexe féminin ont du mal à entrer et à atteindre un certain statut, secteur où les femmes peuvent rarement se joindre à la coterie des hommes. L'équité pour les femmes, les minorités visibles, les peuples autochtones et les personnes handicapées (ceux et celles que Mary O'Brien appelle les personnes dans un état comateux) commence à peine à se faire sentir (1). Une autre auteur a rencontré des Salvadoriennes handicapées et nous livrent les récits. Ces femmes, au désespoir d' avoir accès au système d'éducation, ont décidé de s'organiser et de s'instruire elles-mêmes. En cours de route, elles ont découvert leurs points forts. Une éducation anti-raciste étudie la rançon dont le racisme envahit notre existence et le problème précis qu'il pose au féminisme. Dans le cadre de ses travaux, la troupe de théâtre collective Sistren lutte contre le racisme, comme l'exlique un autre article de ce numéro.

À la dernière réunion du Conseil d'administration du CCPEF, nous avons invoqué le besoin de prêter plus attention à la diversité des femmes, de façon qu'en tant que porte-parole national de l'éducation de l'apprentissage des femmes au Canada. nous représentions mieux les Canadiennes de tous les horizons. Quand nous jetons un coup d'oeil sur les membres du Conseil d'administration, nous remarquons qu'ils sont pour la plupart blancs et appartiennent à la classe moyenne. Nous sommes choquées de le reconnaître car nous étions convaincues que nous essayions d'être à l'écoute de toutes les femmes.

Nous avons vraiment envie d'être ouvertes et d'écouter d'autres femmes parler de leur existence et de leur apprentissage. Nous pouvons tant apprendre les unes des autres. Dans œ numéro, nous nous instruisons aux côtés de Lona Smiley qui a suivi un programme de réinsertion à l'emploi et nous raconte la persévérance qu'il lui a fallue et les angoisses qu'elle a connues. Nous prenons aussi conscience qu'il n' existe pas que ce système d'éducation se fondant sur l'exclusion a le sexisme grâce à un parent qui scolarise ses enfants à domicile et à une étudiante qui prépare un portfolio sur ses apprentissage expérimentaux.

Depuis que je suis membre du Conseil d'administration du CCPEF (juin dernier), j'ai appris à comprendre le pouvoir que nous détenons collectivement grâce au respect que nous éprouvons pour chacune d'entre nous. Nous luttons pour améliorer le système d'éducation, mais nos luttes ne doivent pas être isolées pour que nos différences individuelles soient entendues. Nous nous donnons mutuellement des forces en nous racontant nos histoires. Ce que je continue à trouver enthousiasment à propos du CCPEF est son engagement à l'égard de la croissance personnelle à sa participation dans différentes communautés, qu'il s' agisse celles de l'enseignement supérieur, de l'éducation de la petite enfance ou de la formation professionnelle. Comme le dit Adrienne Rich dans Of Women Born: La chose la plus importante qu'une femme peut faire pour une autre est de l'éclairer sur ses possibilités et d'élargir celles-ci. (2) Réfléchissez à ce que nous pouvons accomplir toutes ensemble.

Norma Lundberg siège au Conseil d'administration du CCPEF. Elle est egalement membre du Comite de redaction.

  1. Mary O'Brien, "The Commatization of Women: Patriarchal Fetishism in the Sociology of Education", Interchange: A quarterly review of education, Vol. 15, No. 2,1984.

  2. Adrienne Rich, Of Women Born, New York: W.W. Norton & Co., 1976 p.246.


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